La perte d’un proche, d’un lien ou d’un repère important constitue une expérience profondément déstabilisante.
Le deuil ne se résume pas à une période de tristesse passagère, mais correspond à un processus psychique complexe, qui engage l’ensemble de la personne : émotions, pensées, corps, relations et rapport au temps.
Les personnes endeuillées décrivent souvent une alternance d’états émotionnels intenses : tristesse, colère, culpabilité, sentiment de vide, anxiété, mais aussi parfois soulagement ou apaisement.
Ces réactions peuvent surprendre, voire inquiéter, tant elles sont variables et parfois contradictoires.
Le deuil : un processus singulier et non linéaire
Les travaux contemporains sur le deuil montrent qu’il n’existe pas de trajectoire universelle.
Contrairement aux représentations encore largement diffusées, le deuil ne se déroule pas selon des étapes fixes à franchir dans un ordre donné.
Il s’agit plutôt d’un processus d’adaptation, au cours duquel la personne oscille entre :
- des moments de confrontation à la réalité de la perte,
- et des moments de mise à distance émotionnelle, nécessaires pour préserver un équilibre psychique.
Ces mouvements, parfois déroutants, sont des tentatives d’ajustement normales face à une rupture majeure.
Une temporalité particulière : vivre avec la perte au quotidien
L’une des difficultés fréquemment rapportées par les personnes endeuillées concerne le rapport au temps.
Se projeter dans l’avenir peut devenir difficile, voire impossible pendant un certain temps. Le quotidien prend alors une place centrale.
Il ne s’agit pas d’« avancer » coûte que coûte, mais souvent d’apprendre à composer avec la perte, jour après jour, en tenant compte de ses ressources du moment.
Certaines journées peuvent être plus légères, d’autres plus lourdes, sans que cela ne signifie une régression ou un échec dans le processus.
Reconnaître cette temporalité spécifique permet de diminuer la pression sociale et personnelle liée à l’idée qu’il faudrait « aller mieux » rapidement.
Quand le deuil devient particulièrement éprouvant
Si le deuil fait partie de l’expérience humaine, certaines situations peuvent le rendre plus complexe ou plus douloureux à traverser.
C’est notamment le cas lorsque :
- la perte a été soudaine ou violente,
- le lien avec la personne perdue était très structurant,
- des deuils antérieurs n’ont pas pu être élaborés,
- ou que la personne se retrouve isolée émotionnellement.
Dans ces situations, la souffrance peut se manifester par des émotions envahissantes, des ruminations persistantes, des images intrusives ou un sentiment de blocage.
Un accompagnement psychothérapeutique peut alors offrir un cadre sécurisant pour soutenir le processus d’intégration.
Repères théoriques pour accompagner le deuil
Les approches actuelles du deuil mettent l’accent sur la nécessité de :
- reconnaître pleinement la réalité de la perte,
- permettre l’expression des émotions, sans les juger,
- soutenir l’intégration progressive du souvenir,
- et accompagner la réorganisation de la vie psychique et relationnelle.
Il ne s’agit pas d’effacer le lien avec la personne disparue, mais de le transformer, afin qu’il puisse continuer d’exister sans entraver la possibilité de vivre et de s’engager à nouveau.
La place de l’EMDR dans l’accompagnement du deuil
L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) est une approche psychothérapeutique reconnue, initialement développée pour le traitement des traumatismes.
Dans le cadre du deuil, elle peut être indiquée lorsque la perte est associée à :
- des souvenirs particulièrement douloureux ou choquants,
- une charge émotionnelle restée très intense,
- ou des images qui s’imposent de manière répétée.
L’objectif n’est pas de supprimer le souvenir ou l’attachement, mais d’aider le cerveau à traiter certaines informations restées bloquées, afin que les souvenirs deviennent moins envahissants et plus intégrés.
Ce travail s’inscrit toujours dans le respect du rythme et des capacités de la personne.
Pourquoi proposer des groupes de parole autour du deuil ?
Le deuil est souvent vécu dans une grande solitude, même lorsque l’entourage est présent.
Les groupes de parole offrent un espace spécifique, distinct du cadre familial ou amical, où chacun peut s’exprimer librement.
Ils permettent notamment :
- de mettre des mots sur des vécus parfois difficiles à formuler,
- de normaliser les réactions émotionnelles,
- de rompre l’isolement,
- et de bénéficier du soutien du groupe, sans comparaison ni injonction.
Les groupes de parole proposés s’adressent aux personnes confrontées à un deuil (hors deuil parental), souhaitant partager et cheminer dans un cadre sécurisant, respectueux et bienveillant.
En conclusion
Traverser un deuil demande du temps, de la patience et souvent de l’indulgence envers soi-même.
Il n’existe pas de « bonne » manière de vivre une perte, mais des chemins singuliers, façonnés par l’histoire, les liens et les ressources de chacun.
Les groupes de parole s’inscrivent dans cette perspective : offrir un espace pour déposer ce qui est vécu, être entendu, et progressivement retrouver un équilibre, sans nier l’importance de ce qui a été perdu.
Des groupes de parole autour du deuil sont actuellement en cours de constitution.
Ces espaces proposent un temps de parole et de soutien pour les personnes traversant un deuil, souhaitant mettre des mots sur leur vécu, partager leurs émotions et rompre l’isolement, dans un cadre bienveillant et sécurisé.